« J’appellerai « ethnie » cet ensemble de groupes locaux se sachant issus d’une même souche, parlant des langues apparentées et partageant un certain nombre de principes d’organisation de la société et de représentations de l’ordre social et cosmique, ainsi que des valeurs communes. » (Maurice GODELIER, 2012, 106)
6. Qu'est ce que la culture?
J’utiliserais cette définition en en retranchant les « valeurs communes », notion trop floue qui suggère l’homogénéité des valeurs au sein d’une même ethnie, présomption qui me semble éminemment contestable, en particulier dans les sociétés modernes.
J’emploie ici le mot « culture » pour désigner l’ensemble des représentations et des principes qui organisent consciemment les différents domaines de la vie sociale, ainsi que les valeurs attachées à ces manières d’agir et de penser. (GODELIER, 2012, 106)
7. Qu'est ce que la société?
La définition suivante, celle de « société », n’est pas présentée comme une définition, car il s’agit d’un des problèmes abordés dans le chapitre (et plus largement dans le livre). Ces extraits représentent cependant assez bien les traits d’une « société ».
« Un groupe territorial devient une « société » lorsqu’un certain nombre de groupes et d’individus revendiquent de se reproduire ensemble sur un même territoire et se désignent eux-mêmes, à l’intention des groupes voisins, par un grand nom qui recouvre les noms particuliers de leurs clans et lignages de naissance. […] Mais une fois apparu, un groupe territorial nouveau […] doit à la fois se reproduire comme tel, comme un tout, et se représenter à lui-même et se présenter aux autres comme tel, comme un tout. » (Maurice GODELIER, 2012, 109)
8. Qu’est-ce finalement qu’une « tribu » ?
C’est une société locale (et non une communauté) composée d’un ensemble de groupes de parenté, unis par les mêmes principes d’organisation de la vie sociale, les mêmes modes de pensée et parlant la même langue, liés par des mariages répétés et associés dans la défense et l’exploitation des ressources d’un territoire commun. (GODELIER, 2012, 109)
Chez Godelier, la culture permet de comprendre le monde, l’ethnie fournit une identité et la société et la tribu fournissent un accès aux ressources matérielles nécessaires à la survie.
Bibliographie
Les anthropologues désignent habituellement par le terme « tribu » deux réalités, deux domaines de faits différents mais liés. D'une part, presque tous s'en servent pour distinguer un type de société parmi d'autres, un mode d'organisation sociale spécifique qu'ils comparent à d'autres (« bandes », « États », etc.). Ce point cependant ne fait pas l'unanimité parmi eux par suite de l'imprécision des critères sélectionnés pour définir et isoler ces divers types de société. Mais le désaccord est encore plus profond à propos du second usage du terme « tribu », lorsqu'il désigne un stade de l'évolution de la société humaine. Le lien entre ces deux usages est d'ailleurs très clair puisque, dans la perspective des évolutionnistes, chaque stade d'évolution est caractérisé par un type spécifique d'organisation sociale. La majorité des anthropologues se refusent toutefois à conclure de l'existence d'un mode d'organisation sociale à l'existence d'un stade nécessaire de l'évolution de l'humanité et contestent même la possibilité théorique d'une analyse scientifique de l'évolution des sociétés humaines (E. R. Leach), ou dénient tout intérêt à se préoccuper de leur histoire. C'est le cas, à l'exception notable d'Evans-Pritchard ou de Raymond Firth, de la plupart des anthropologues qui se réclament du fonctionnalisme ou d'un certain structuralisme. En outre, même parmi ceux qui défendent le projet de construire une théorie scientifique de l'évolution sociale, certains, comme Herbert Lewis, ne considèrent pas le mode d'organisation tribale de la société comme un stade nécessaire et général de cette évolution, et d'autres, comme Morton Fried, vont plus loin encore, et y voient à la fois l'effet secondaire de l'apparition de sociétés étatiques et un véritable cul-de-sac de l'évolution de l'humanité.
En définitive, bien que le terme « tribu » envahisse littéralement les écrits et les discours des anthropologues et ne semble pas situé dans les zones des combats théoriques les plus âpres de l'anthropologie, depuis une décennie le doute émerge sur le terme tribu qui ne correspond pas à la réalité structurelle de certain groupe ethnique [...] tels que les groupes ethnique d'Afrique...